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nées, et par lesquelles il a constamment tenu éveillés, pendant tout ce temps, l'étonnement et l'admiration de ses contemporains.

Dans ce premier mémoire, en effet, il ne se borne pas à démontrer que l'éléphant fossile est une espèce distincte des espèces actuelles, une espèce éteinte, une espèce perdue ; il déclare nettement que le plus grand pas qui puisse être fait vers la perfection de la théorie de la terre, serait de prouver qu'aucun de ces animaux dont on trouve les dépouilles répandues sur presque tous les points du globe, n'existe plus aujourd'hui.

Il ajoute que ce qu'il vient d'établir pour l’éléphant, il l'établira bientôt, d'une manière non moins incontestable, pour le rhinocéros, pour l’ours, pour le cerf, fossiles, toutes espèces également distinctes des espèces vivantes, toutes espèces également perdues.

Enfin, il termine par cette phrase remarquable, et dans laquelle il semblait annoncer tout ce qu‘il a découvert depuis : « Qu'on se demande, dit-il, pourquoi l'on trouve tant de dépouilles d'animaux inconnus, tandis qu'on n'en trouve aucune dont on puisse dire qu'elle appartient aux espèces que nous connaissons, et l'on verra combien il est probable qu‘elles ont toutes appartenu à des êtres d'un monde antérieur au nôtre, à des êtres détruits par quelques révolutions du globe, a des êtres dont ceux qui existent aujourd'hui ont rempli la place. »

L'idée d'une création entière d'animaux antérieure à la création actuelle ; l'idée d'une création entière détruite et perdue, venait donc enfin d'être conçue dans son ensemble ! Le voile qui recouvrait tant d'étonnants phénomènes allait donc enfin être soulevé, ou plutôt, il l'était déjà ; et le mot de cette grande énigme qui, depuis un siècle, occupait si fortement les esprits, ce mot venait d'être dit.

Mais, pour transformer en un résultat positif et démontré cette vue si vaste et si élevée, il fallait rassembler de toutes parts les dépouilles des animaux perdus ; il fallait les revoir, les étudier