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hommes, vous êtes digne aussi de connaître les œuvres de la nature.

Ces paroles décidèrent la vocation de l'enfant ; elles étaient restées profondément gravées dans la mémoire de M. Adanson, et il les répétait encore avec intérêt vers la fin de sa vie.

Dès cet instant, sa curiosité ne change plus d'objet ; l'œil attaché pour ainsi dire à cette étonnante machine, il y soumet tout ce que lui fournit l'enceinte étroite de son collège, tout ce qu'il peut recueillir dans les promenades en s'écartant furtivement des sentiers tracés à ses camarades, les plus petites parties des mousses, les insectes les plus imperceptibles. Il connut ces productions que la nature semble avoir réservées pour l'œil curieux du physicien, avant celles qu'elle abandonne aux jouissances générales, et son esprit était déjà tout rempli de ces merveilles de détail, que son âme n'avait point encore éprouvé l'impression du grand spectacle de l'univers. Peut-être même ne fut-elle jamais livrée à ces émotions à la fois si douces et si vives ; il n'eut point de jeunesse ; le travail et à méditation le saisirent à son adolescence, et pendant près de soixante-dix ans tous ses jours, tous ses instants furent remplis par les observations pénibles, par les recherches laborieuses d'un savant de profession.

Admis, au sortir du collège, dans les cabinets de Réaumur et de Bernard de Jussieu, une riche moisson s'ouvrit à son activité ; il la dévora avec une sorte de fureur : il passait ses journées entières au Jardin des Plantes. Non content d'entendre les professeurs, il ré -