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sous ces deux rapports, les faits se sont tellement et si rapidement multipliés, que quelques esprits élevés et hardis n'ont pas craint, dès lors même, de chercher à en embrasser la généralité dans leurs théories, et d'essayer de remonter ainsi à leurs causes.

C'est, en effet, à partir de la fin du dix-septième siècle et de la première moitié du dix-neuvième qu'ont paru successivement les systèmes fameux de Burnet, de Leibnitz, de Woodward, de Whiston, de Buffon ; tous systèmes prématurés, tous systèmes plus ou moins erronés sans doute, mais qui eurent du moins cet avantage d'accoutumer l'esprit humain à porter enfin une vue philosophique sur ces étonnants phénomènes et à oser se mesurer avec eux.

Un antre avantage, et plus précieux encore, c'est que tous ces systèmes, excitant les esprits, amenèrent bientôt, de toutes parts, des observations plus nombreuses, plus précises, plus complètes, dont le premier effet fut de renverser tout ce que ces systèmes avaient d'imaginaire et d'absurde ; et le second, de fonder sur leurs débris mêmes la véritable théorie, l'histoire positive de la terre.

Le dix-huitième siècle, qui a marché si vite en tant de choses, n'a rien vu peut·être de plus rapide que les progrès de la science qui nous occupe. Ce même siècle, qui, dans sa première moitié, avait vu ou s'élever, ou tomber tous ces systèmes dont je viens de parler, édifices brillants et fragiles, a vu poser, dans la seconde, par les mains des Pallas, des Deluc, des de Saussure, des Werner, des Blumenbach, des Camper, les premiers fondements du monument durable qui devait leur succéder.

Parmi ces progrès, je dois surtout rappeler ici ceux qui se rapportent aux dépouilles, fossiles des corps organisés.

Ce sont, en effet, ces restes des corps organisés, témoins subsistants de tant de révolutions, de tant de bouleversements éprouvés par le globe, qui ont fait naître les premières hypothèses de la géologie fantastique ; et ce sont encore ces restes qui ont fini par donner, entre les mains de M. Cuvier, les résultats les plus évidents, les lois les plus assurées de la géologie positive.