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de l'épuration du métal des cloches. Partout il montra la même justice et la même sagacité.

On voit que tous ces travaux de Darcet furent modestes comme lui. Il chercha toujours plus l'utilité que la gloire ; il craignait plus d'errer qu'il ne désirait de jouir : de là sa réserve extrême et sa lenteur à publier. Ajoutez qu'il n'eut jamais la force, ou, si l'on veut, la folie de sacrifier les jouissances de l'amitié à l'espoir de la célébrité ; et vous verrez pourquoi, avec des moyens multipliés, il ne s'est pas placé plus haut parmi les chimistes de son siècle.

Son caractère résulte assez clairement de l'histoire de sa vie. D'une position assez triste il a été élevé successivement jusqu'à l'une des places les plus éminentes de l'État, toujours porté par d'autres, et sans efforts de sa part comme sans résistance. Toujours content de sa situation présente, son contentement semblait rejaillir sur tout ce qui l'environnait ; le sentiment intime qu'il en avait lui-même ne lui permettait pas de connaître cette triste passion de la jalousie. Dans son intérieur, une égalité d'humeur inaltérable, une gaieté douce, une complaisance à toute épreuve, eussent à peine laissé croire qu‘il était le chef de sa famille, si la tendre vénération de ceux qui la composaient ne l'eût sans cesse rappelé.

On a pu se demander pourquoi, à la fin d'une grande révolution, on a porté subitement à la première magistrature un homme qui n'y avait pris aucune part directe, et que ni l'éclat de son nom, ni son crédit, ni ses services, ne semblaient appeler à cette élévation.