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France allait jouir des mêmes avantages que ces pays rivaux ; et c'était lui-même qui était chargé de les procurer, c'était son nom qui allait s‘attacher à cette glorieuse époque ! On le vit, rayonnant de plaisir, annoncer cette nouvelle à ses amis. Ce fut avec une sorte de transport qu'il se prépara à quitter sa famille pour un voyage qui lui paraissait devoir être si court, si utile et si instructif.

Il ne prévoyait guère les obstacles et les chagrins qui l'attendaient ; il n'imaginait pas qu'il ne lui serait plus donné de revoir sa patrie.

Les premiers de ces obstacles, qui tenaient à la nature même des choses, ne furent pas les plus fâcheux.

On sait qu'encore aujourd'hui, dans le plus beau climat de l'Europe, l'Espagne croit devoir gouverner ses troupeaux comme ces peuples nomades confinés dans les plaines stériles de l'Afrique et de la Tartarie. Au lieu de préparer dans chaque ferme la quantité de fourrage nécessaire aux moutons, on les fait errer de province en province, suivant les saisons, pour chercher des pâturages. Des millions de ces animaux descendent en automne des montagnes de Galice et de Léon, et vont peupler pendent l'hiver les riches plaines de l'Andalousie et de l‘Estrémadure, d'où ils repartent au printemps. Une bande de terrain d'une largeur énorme est réservée pour leur passage, et perdue pour l'agriculture : les lois défendent sévèrement d'en enclore ni d'en cultiver aucune partie. On observe dans ces voyages la même discipline que dans ceux d'une armée : chaque grand troupeau ou cavagna, de 40 à 50,000 bêtes, se subdivise en trou -