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tion qu’il domine de toute la supériorité de l’âme sur le corps, autant m’est odieux le prosélytisme politique, c’est-à-dire l’étroit esprit de conquête, ou pour parler plus juste encore, l’esprit de rapine justifié par un trop habile sophiste qu’on appelle la gloire ; loin de rallier le genre humain, cette ambition étroite le divise : l’unité ne peut naître que de l’élévation et de l’étendue des idées : or, la politique de l’étranger est toujours petite, sa libéralité hypocrite ou tyrannique ; ses bienfaits sont toujours trompeurs : chaque nation doit puiser en elle-même les moyens de perfectionnement dont elle a besoin. La connaissance de l’histoire des autres peuples est utile comme science, elle est pernicieuse quand elle provoque l’adoption d’un symbole de foi politique : c’est substituer un culte superstitieux à un culte vrai.

Je me résume : voici le problème proposé non par les hommes, mais par les événements, par la succession des circonstances, par les choses enfin, à tout Empereur de Russie : favoriser parmi la nation les progrès de la science, afin de hâter l’affranchissement des serfs ; et tendre à cette fin par l’adoucissement des mœurs, par l’amour de l’humanité, de la liberté légale, en un mot améliorer les cœurs pour adoucir les destinées : c’est une condition sans laquelle nul homme ne peut régner aujourd’hui, pas même à Moscou ; mais ce qu’il y a de particulier dans la charge