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tant aux yeux de la personne à qui j’avais demandé au dernier moment quelques lettres de recommandation pour supposer qu’elle m’eût fait devancer par un courrier.

La femme du gouverneur a pour frère un prince***, qui écrit parfaitement notre langue, il a publié des ouvrages en vers français, et il a bien voulu me faire présent d’un de ses recueils. En ouvrant le livre, j’ai trouvé ce vers plein de sentiment ; il est dans une pièce intitulée : Consolations à une mère :

Les pleurs sont la fontaine où notre âme s’épure.

Certes, on est heureux d’exprimer si bien sa pensée dans une langue étrangère.

À la vérité les Russes du grand monde, surtout ceux de l’âge du prince***, ont deux langues ; mais je ne prends pas ce luxe pour de la richesse.

Toutes les personnes de la famille*** se sont empressées à l’envi de me faire les honneurs de la maison et de la ville.

On m’a comblé d’éloges détournés et ingénieux sur mes livres, qu’on citait en se rappelant une foule de détails que j’avais oubliés. La manière délicate et naturelle dont ces citations étaient ramenées m’aurait plu, quand elle m’aurait moins flatté. J’aurais voulu être admis dans ce cercle élégant, même pour y voir fêter un autre. Les livres en petit nombre que la cen-