Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/65

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Je réponds à la femme du gouverneur par un sourire d’étonnement qui voulait dire : Ceci ressemble au conte d’Aline ; expliquez-moi ce mystère.

L’explication ne se fit pas attendre.

J’ai été élevée, continua la dame, par une amie de madame de Sabran, votre grand mère ; cette amie m’a parlé souvent des grâces naturelles et du charmant esprit de madame de Sabran, de l’esprit et des talents de votre oncle, de votre mère ; elle m’a même souvent parlé de vous, quoiqu’elle eût quitté la France avant votre naissance ; c’est madame de*** ; elle suivit en Russie la famille de Polignac, émigrée, et depuis la mort de la duchesse de Polignac, elle ne m’a jamais quittée. »

En achevant ces mots, madame*** me présenta à sa gouvernante, personne âgée qui parlait français mieux que moi, et dont la physionomie exprimait la finesse et la douceur.

Je sentis qu’il fallait renoncer pour cette fois à mon rêve de boyards, rêve qui, malgré sa niaiserie, ne laissait pas que de m’inspirer quelques regrets ; mais j’avais de quoi me dédommager de mon mécompte. Madame***, la femme du gouverneur, est d’une des grandes familles originaires de la Lithuanie ; elle est née princesse ***. Outre la politesse commune à presque toutes les personnes de ce rang dans tous les pays, elle a pris le goût et le ton de la société