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fides en ne voulant plus résider en Danemark, ils perdraient non-seulement leur pension, mais encore tout droit à l’assistance de Sa Majesté.

Élisabeth lui répondit avec larmes : « Dieu nous préserve, nous qui venons de recevoir une si grande grâce, d’être ingrats ! Croyez-moi, dit-elle avec fermeté, nous ne nous opposerons jamais à la volonté de Sa Majesté ; elle est notre mère et notre protectrice. Nous n’espérons qu’en elle, nous serait-il possible d’oser fâcher Sa Majesté en quelque chose, et de nous exposer à perdre pour toujours ses bonnes grâces ? » Ensuite elle demande à Melgunof : « Notre tante nous prend-elle chez elle, ou nous laissera-t-elle dans quelque ville ? Nous désirerions plutôt vivre dans une petite ville quelconque, car jugez vous-même comment nous serions à la cour. Nous ne savons pas du tout comment nous conduire avec les gens et de plus nous ne comprenons pas leur langue. » Melgunof lui répondit qu’ils pourraient à leur arrivée en Danemark demander cela à leur tante, et il promit de tâcher de son côté que leurs désirs pussent s’accomplir.

Ayant ainsi tranquillisé la princesse, Melgunof fut extrêmement satisfait de les trouver tous, contre son attente, consentants à ce qu’il avait proposé et regardant d’un air joyeux les préparatifs de départ. Le trajet par eau les effraya pourtant, surtout les princesses qui depuis leur naissance n’avaient jamais été sur mer et qui n’avaient même jamais vu comment se mouvait un bateau. Quoique Melgunof les assurât qu’il n’y avait aucun danger et que lui-même les accompagnerait à la distance de cent verstes, cependant elles montrèrent de la crainte à ce sujet et dirent : « Vous êtes des hommes et n’avez peur de rien, mais si votre femme ve-