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fou à enfermer : il ajoute que le malade sera livré aux soins des médecins.

Cette torture d’un nouveau genre fut appliquée sans délai, mais d’une façon si sévère que le fou supposé pensa justifier l’arrêt dérisoire du chef absolu de l’Église et de l’État. Le martyr de la vérité fut près de perdre la raison à lui déniée par une décision d’en haut. Aujourd’hui, au bout de trois années d’un traitement rigoureusement observé, traitement aussi avilissant qu’il était cruel, le malheureux théologien du grand monde commence seulement à jouir d’un peu de liberté ; mais n’est-ce pas un miracle !… maintenant il doute de sa propre raison, et sur la foi de la parole Impériale il s’avoue lui-même insensé !… O profondeurs des misères humaines !… En Russie, la parole souveraine, lorsqu’elle réprouve un homme, équivaut aujourd’hui à l’excommunication papale du moyen âge !!…

Le fou supposé peut, dit-on, maintenant communiquer avec quelques amis : on m’a proposé, pendant mon séjour à Moscou, de me mener le voir dans sa retraite ; la peur m’a retenu et même la pitié, car ma curiosité lui aurait paru insultante. On ne m’a pas dit quelle peine ont subie les censeurs du livre qu’il a publié.

C’est un exemple tout récent de la manière dont les affaires de conscience se traitent aujourd’hui en