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où les distances sont déjà une calamité ; ils redoutent même… jugez jusqu’où va leur prudence !… ils redoutent les climats chauds !… Attendez un peu, vous verrez à quoi aboutiront toutes ces craintes.

Et je ne signalerais pas tant de mensonges, tant de périls, tant de fléaux ? Non, non ; j’aime mieux me tromper et parler que d’avoir vu juste et de me taire. S’il y a témérité à dire ce que j’ai observé il y aurait crime à le cacher. Je me fais donc un devoir, tout en reconnaissant ma faiblesse, et tout en regrettant mon peu d’autorité, de rappeler à l’Europe occidentale que son salut dépend de la fondation d’un Empire grec indépendant et fort, dont avec le temps Constantinople deviendrait la capitale. Tel est le seul but légitime de l’alliance de la France avec l’Angleterre. Tel est aussi l’unique moyen de remédier au démembrement de la Pologne.

À tout cela les Russes ne me répondront pas ; ils diront : « Trois mois de voyage, il a mal vu. »

Il est vrai, j’ai mal vu, mais j’ai bien deviné.

Ou s’ils me font l’honneur de me réfuter, ils nieront les faits ; les faits, matière brute de tout récit, et qu’on est accoutumé de compter pour rien à Pétersbourg, où le passé comme l’avenir, comme le présent, est à la disposition du maître ; car, encore une fois, les Russes n’ont rien à eux que l’obéissance et l’imitation ; la direction de leur esprit, leur jugement, leur