Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/377

Cette page a été validée par deux contributeurs.

livrée tôt ou tard par nos dissensions : elle fomente chez nous l’anarchie dans l’espoir de profiter d’une corruption favorisée par elle, parce qu’elle est favorable à ses vues : c’est l’histoire de la Pologne recommencée en grand. Depuis longues années Paris lit des journaux révolutionnaires, révolutionnaires dans tous les sens, payés par la Russie. « L’Europe, dit-on à Pétersbourg, prend le chemin qu’a suivi la Pologne ; elle s’énerve par un libéralisme vain, tandis que nous restons puissants, précisément parce que nous ne sommes pas libres : patientons sous le joug, nous ferons payer aux autres notre honte.

Le plan que je vous révèle ici peut paraître chimérique à des yeux distraits ; il sera reconnu pour vrai par tout homme initié à la marche des affaires de l’Europe et aux secrets des cabinets pendant les vingt dernières années. Il donne la clef de bien des mystères, il explique en un mot l’extrême importance que des personnes sérieuses par caractère et par position attachent à n’être vues des étrangers que du beau côté. Si les Russes étaient, comme ils le disent, les appuis de l’ordre et de la légitimité, se serviraient-ils d’hommes, et, qui pis est, de moyens révolutionnaires ?

Le monstrueux crédit de la Russie à Rome est un des effets du prestige contre lequel je voudrais nous prémunir[1]. Rome et toute la catholicité n’a pas

  1. Écrit en 1839.