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balternes qui respectent l’ennemi, c’est-à-dire le maître, tant qu’ils n’osent pas le frapper, est toujours uni à un peu d’artifice. Grâce à cette supériorité de sérail, les Russes sont impénétrables ; il est vrai qu’on voit toujours qu’ils cachent quelque chose, mais on ne sait ce qu’ils cachent, et cela leur suffit. Ils seront des hommes bien redoutables et bien fins lorsqu’ils parviendront à masquer même leur finesse.

Déjà quelques-uns d’entre eux sont arrivés jusque-là ; ce sont les plus avancés du pays, tant par le poste qu’ils occupent que par la supériorité d’esprit avec laquelle ils remplissent leur charge. Ceux-là, je n’ai pu les juger que de souvenir ; leur présence a un prestige qui me fascinait.

Mais, bon Dieu ! à quoi peut aboutir tout ce manége ? Quel motif suffisant assignerons-nous à tant de feinte ? Quel devoir, quelle récompense peut faire si longtemps supporter à des visages d’homme la fatigue du masque ?

Le jeu de tant de batteries ne serait-il destiné qu’à défendre un pouvoir réel et légitime ?… Un tel pouvoir n’en a pas besoin, la vérité se défend d’elle même. Veut-on protéger de misérables intérêts de vanité ? peut-être. Cependant, prendre de tels soucis pour arriver à un résultat si misérable, ce serait un travail indigne des hommes graves qui se l’imposent ; je leur attribue une pensée plus profonde ; un but