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tigue et qu’ennui sans dédommagement : vous en jugerez en lisant mes lettres.

Plusieurs de mes amis m’ont écrit déjà qu’ils sont d’avis de ne les pas faire paraître.

Lorsque je m’apprêtais à quitter Pétersbourg, un Russe me demanda, comme tous les Russes, ce que je dirais de son pays. « J’y ai été trop bien reçu pour en parler, » lui ai-je répondu.

On se fait contre moi des armes de cet aveu, où j’avais cru cacher à peine poliment une épigramme. « Traité comme vous l’avez été, m’écrit-on, il est certain que vous ne pouvez dire la vérité ; or, comme vous ne savez écrire que pour elle, vous feriez mieux de vous taire. » Telle est l’opinion d’une partie des personnes que j’ai l’habitude d’écouter. En tout cas, elle n’est pas flatteuse pour les Russes.

La mienne est que sans blesser la délicatesse, sans manquer à la reconnaissance qu’on doit aux personnes, quand on leur en doit, ni au respect qu’on se doit toujours à soi-même, il y a une manière convenable de parler sincèrement des choses et des hommes publics ; j’espère avoir trouvé cette manière là. Il n’y a que la vérité qui choque, à ce qu’on prétend, c’est possible ; mais en France, du moins, nul n’a le droit ni la force de fermer la bouche à qui la dit. Mes cris d’indignation ne pourront passer pour l’expression déguisée de la vanité blessée. Si je