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la condescendance de nous céder à un prix deux ou trois fois plus élevé que le tarif des postes impériales. Nous l’aurions refusé et renvoyé d’abord ; puis, de guerre lasse, nous aurions fini par implorer le retour de ces précieuses bêtes, et par payer aux hommes tout ce qu’ils auraient voulu. La même scène se serait renouvelée à chaque poste. Voilà comment voyagent en ce pays les étrangers inexpérimentés et dénués de protection. Il n’en est pas moins établi et reconnu que la poste, en Russie, coûte fort peu de chose et qu’on y voyage très-vite.

Ne vous semble-t-il pas, comme à moi, qu’après avoir apprécié comme je le dois la faveur qui m’a été accordée par le directeur général des postes, je conserve le droit de vous dire quels sont les ennuis que son obligeance m’épargne ?

Les Russes sont toujours en garde contre la vérité qu’ils redoutent ; mais moi qui appartiens à une société où la vie se passe au grand jour, où tout se publie et se discute, je ne m’embarrasse nullement des scrupules de ces hommes chez lesquels rien ne se dit. Parler est en Russie une action de mauvaise compagnie : murmurer quelques sons vides de sens à l’oreille les uns des autres, et finir chaque phrase insignifiante par demander le secret de ce qu’on vient de ne pas dire, c’est faire preuve de tact et de bon ton… Toute parole nette et précise fait événement