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qui n’avait pas remarqué une de ces soupapes trompeuses, tombe d’une quinzaine de pieds de haut sur des marches de bois. Que fait la maîtresse de la maison ? vous auriez peine à le deviner. Sans même vouloir s’assurer si la malheureuse est morte ou vivante, sans courir à elle pour s’informer de son état, sans appeler du secours, sans envoyer au moins chercher un chirurgien, elle plante là l’accident, et court dévotement s’enfermer dans son oratoire pour y prier la sainte Vierge de venir en aide à la pauvre morte… morte ou blessée, selon ce qu’il aura plu au bon Dieu d’en ordonner. Cependant la blessée, non morte, et qui n’avait rien de cassé, eut le temps de se relever, de remonter dans l’antichambre et de se faire ramener chez elle, avant que sa pieuse amie eût quitté son prie-Dieu. On ne put même arracher celle-ci de cet asile qu’en lui criant à travers la porte que l’accident n’avait eu aucune suite grave, et que la malade était retournée chez elle, où elle venait de se coucher, mais par pure précaution. Aussitôt la charité active se réveille dans le cœur désolé de la bonne dévote russe qui, reconnaissante de l’efficacité de ses prières, court officieusement chez son amie, insiste pour entrer, arrive auprès du lit de la patiente et l’accable de protestations d’intérêt qui la privent pendant une heure au moins du repos dont elle a besoin.

Ce trait d’enfantillage m’a été conté par la per-