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gneur ; celui-ci, décidé à savoir le fond de cette singulière affaire, a recours au remède russe par excellence : il condamne la folle aux verges. Ce traitement ne manque pas son effet.

Au vingt-cinquième coup elle demande grâce et jure de dire la vérité.

Elle est mariée à un homme qu’elle n’aime pas, et c’est pour ne pas travailler au profit de son mari, dit-elle, qu’elle a feint d’être possédée.

Cette comédie servait sa paresse en même temps qu’elle avait rendu la santé à une foule de malades, qui sont venus à elle pleins d’espoir et de confiance, et s’en sont retournés guéris.

Les sorciers ne sont pas rares parmi les paysans russes, auxquels ils tiennent lieu de médecins ; ces fourbes font des cures nombreuses et fort belles, au dire même des gens de l’art !!

Quel triomphe pour Molière ! et quel abîme de doutes pour tout le monde !… L’imagination !… qui sait si l’imagination n’est pas un levier dans la main de Dieu pour élever au-dessus d’elle-même une créature bornée par la matière ? Quant à moi, je pousse le doute au point d’en revenir à la foi, car je crois, malgré ma raison, que le sorcier peut guérir même des incrédules, par un pouvoir dont je ne saurais nier l’existence, quoique je ne puisse le définir. Avec le mot imagination, nos savants se dispensent d’expli-