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tout en ce pays ; mais quelle est la voix qui l’ose exprimer !…

Pourtant quelques tableaux pittoresques consolent par moments l’imagination et récréent les regards.

Sur les chemins qui servent de communications aux divers campements des marchands dont la foire est entourée, sur les ponts, le long des grèves, aux abords des rivières, vous rencontrez d’immenses files d’équipages singuliers ; ce sont des trains qui marchent à vide. Ces roues, réunies par un essieu, reviennent des dépôts où elles ont servi à transporter de longues pièces de bois de construction. Les troncs d’arbres, en allant, étaient portés sur quatre et quelquefois sur six roues, mais quand le train retourne au magasin, chaque essieu avec ses deux roues est séparé du reste et chemine ainsi, traîné par un cheval guidé par un homme. Ce cocher, en équilibre, se tient debout sur l’essieu, et mène son coursier à peine dressé avec une grâce sauvage, avec une dextérité que je n’ai vues qu’aux Russes. Ces Franconi bruts me retracent les cochers du cirque à Byzance ; ils sont vêtus de la tunique grecque : c’est vraiment antique. En Russie on se reporte au Bas-Empire, comme en Espagne on se rappelle l’Afrique, et en Italie, Rome ancienne et Athènes !…

En errant la nuit autour de la foire, on est frappé de loin de l’éclat des boutiques de comestibles, de