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ici ce mot exprime des droits naturels, des besoins véritables, — eût-il d’ailleurs tous les autres biens, est comme une plante privée d’air ; on a beau arroser la racine, la tige produit tristement quelques feuillages sans fleurs.

Les vrais Russes ont quelque chose de particulier dans l’esprit, dans l’expression du visage et dans la tournure. Leur démarche est légère, et tous leurs mouvements dénotent un naturel distingué. Ils ont les yeux très-fendus, peu ouverts et dessinés en forme d’ovale allongé ; le trait qu’ils ont presque tous dans le regard donne à leur physionomie une expression de sentiment et de malice singulièrement agréable. Les Grecs, dans leur langue créatrice, appelaient les habitants de ces contrées syromèdes, mot qui veut dire œil de lézard ; le nom latin sarmates est venu de là. Ce trait dans l’œil a donc frappé tous les observateurs attentifs. Le front des Russes n’est ni très-élevé ni très-large ; mais il est d’une forme gracieuse et pure ; ils ont à la fois dans le caractère de la méfiance et de la crédulité, de la fourberie et de la douceur ; et tous ces contrastes sont pleins de charme ; leur sensibilité voilée est plutôt communicative qu’expansive, c’est d’âme à âme qu’elle se révèle ; car c’est sans le vouloir, sans y penser, sans paroles, qu’ils se font aimer. Ils ne sont ni grossiers ni apathiques comme la plupart des hommes du Nord,