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et de sa mère ; c’est de cette retraite qu’Alexis est sorti pour monter sur le trône et pour fonder la dynastie actuellement régnante. Ce couvent ressemble à tous les autres : un jeune moine, qui n’était pas à jeun, car de très-loin il sentait le vin assez fort, m’a montré la maison en détail ; j’aime mieux les vieux moines à barbe blanche et les popes à têtes chauves que les jeunes solitaires bien nourris. Ce trésor aussi ressemble à tous ceux qui m’ont été montrés ailleurs. Voulez-vous savoir en deux mots ce que c’est que la Russie ? la Russie, c’est un pays où l’on trouve et où l’on voit la même chose et les mêmes gens par tout. Cela est si vrai, qu’en arrivant dans un lieu, on croit toujours y retrouver les choses et les personnes qu’on vient de quitter ailleurs.

À Kunitcha, le bac dans lequel nous avons repassé le Volga n’est pas rassurant ; la barque a si peu de bord que peu de chose la ferait chavirer. Rien ne m’a paru triste comme l’aspect de cette petite ville par un ciel gris, une température humide et froide et pendant une pluie battante qui retenait les habitants prisonniers dans leurs maisons ; un vent violent soufflait ; si la tourmente eût augmenté, nous eussions couru des risques. Je me suis rappelé qu’à Pétersbourg personne ne s’émeut pour repêcher les gens qui tombent dans la Néva, et je me disais : si je me noie dans le Volga à Kunitcha, nul homme ne se jettera à l’eau