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un air de bonhomie, se sont réunis dans un jardin parsemé de promeneurs et d’orchestres cachés parmi des bosquets lointains.

L’Empereur donne le ton de chaque fête : le mot d’ordre de ce jour-là était : naïveté décente, ou l’élégante simplicité d’Horace.

Telle fut toute la soirée la disposition dominante de tous les esprits, y compris le corps diplomatique ; je croyais lire une églogue, non de Théocrite ou de Virgile, mais de Fontenelle.

On a dansé en plein air jusqu’à onze heures du soir, puis, quand des flots de rosée eurent assez inondé les têtes et les épaules des femmes jeunes et vieilles qui assistaient à ce triomphe de la volonté humaine contre le climat, on rentra dans le petit palais qui sert ordinairement d’habitation d’été à la duchesse d’Oldenbourg.

Au centre de la villa (en russe datcha) se trouve une rotonde tout éblouissante de dorures et de bougies : le bal continua dans cette salle, tandis que la foule non dansante inondait le reste de l’habitation. La lumière partait du centre, et dardait ses traits au dehors. On eût dit du soleil, dont les rayons émergents portent en tous sens la chaleur et la vie dans les profondes solitudes de l’Empyrée. Cette éblouissante rotonde était à mes yeux l’orbite où tournait l’astre Impérial dont l’éclat illuminait tout le palais.