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Vous ne sauriez vous faire une idée de l’agitation de la vie que nous menons ici : le spectacle seul de tant de mouvement serait pour moi une fatigue.

Le jeune*** est à Pétersbourg, nous nous rencontrons partout, et avec plaisir : c’est le type du Français actuel, mais vraiment bien élevé. Il me paraît enchanté de tout : ce contentement est si naturel, qu’il est communicatif ; aussi je crois que ce jeune homme plaît autant qu’il veut plaire ; il voyage bien, il a de l’instruction, recueille beaucoup de faits qu’il suppute mieux qu’il ne les classe, à son âge on chiffre plus qu’on n’observe. Il est très-fort sur les dates, les mesures, les nombres et quelques autres données positives, ce qui fait que sa conversation m’intéresse et m’instruit. Mais quelle conversation variée que celle de notre ambassadeur ! Que d’esprit de trop pour les affaires, et combien la littérature le regretterait si le temps qu’il donne à la politique n’était encore une étude dont les lettres profiteront

    fils du marquis qui voulaient prolonger leur séjour à Pétersbourg : « Je compte au moins sur vous, » dit-elle à l’aîné. — « Madame, répond celui-ci, nous avons pour ce jour-là une partie de chasse aux élans. » L’Impératrice, qu’on dit fière, ne se décourage pas, et s’adressant au cadet : « Vous, du moins, vous me restez, » lui dit-elle. Le jeune homme, à bout d’excuses, ne sait que répondre ; mais dans son dépit il appelle son frère et lui dit tout haut : « C’est donc moi qui suis la victime ? » Cette anecdote a fait la joie de la cour,