Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Dans cet entretien, je devais m’imposer la loi de ne faire qu’écouter et répondre ; mais je m’attendais à ce que d’autres noms prononcés par la grande-duchesse vinssent encore flatter mon orgueil patriotique et mettre ma réserve d’ami à de nouvelles épreuves.

Mon attente fut trompée ; la grande-duchesse qui passe sa vie dans le pays du tact par excellence, sait mieux que moi sans doute ce qu’il faut dire et ce qu’il faut taire ; craignant également la signification de mes paroles et celle de mon silence, elle ne prononça pas un mot de plus sur notre littérature contemporaine.

Il est certains noms dont le son seul troublerait l’égalité d’âme et l’uniformité de pensée imposée despotiquement à tout ce qui veut vivre à la cour de Russie.

Voilà ce que je vous prie d’aller lire à mesdames Gay et de Girardin : je n’ai pas la force de recommencer ce récit dans une autre lettre, ni matériellement le temps d’écrire à personne. Mais, une fois pour toutes, je veux vous décrire les fêtes magiques auxquelles j’assiste ici chaque soir.

Chez nous, les bals sont déparés par le triste habit des hommes, tandis que les uniformes variés et brillants des officiers russes donnent un éclat particulier aux salons de Pétersbourg. En Russie, la magnificence de la parure des femmes se trouve en accord