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nous devions nous rendre à Berlin, où ma mère comptait rejoindre sa mère et son frère.

On ne mit personne que ma bonne dans la confidence de ce plan. Ma mère se défiait de ses gens, d’ailleurs, par égard pour eux-mêmes, elle voulait qu’ils pussent dire hardiment qu’ils avaient ignoré notre fuite. En cherchant à sauver sa vie, elle n’avait garde de négliger le soin de leur sûreté.

Pour écarter tout soupçon de complicité, il fut convenu qu’elle sortirait de chez elle le soir, seule et à pied, déguisée en ouvrière, et que ma bonne sortirait une demi-heure plus tôt en m’emportant dans ses bras, caché sous son mantelet. On devait attacher au balcon du salon une échelle de corde qui ferait supposer que ma mère était descendue dans la rue, la nuit, par la fenêtre, à l’insu des gens de la maison. Nous logions au premier étage rue de Bourbon. On avait depuis quelques jours fait sortir de chez nous, un à un, plusieurs objets de première nécessité pour former le petit paquet de voyage de ma mère. Ces objets avaient été déposés chez un ami, qui devait les rendre à ma mère, hors de la barrière, à l’heure indiquée.

Tout étant prêt, Nanette part avec moi pour se rendre au bureau des voitures publiques de Strasbourg, et ma mère se prépare à sortir pour prendre en poste la route de Flandre.