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chercha l’alliance de la Prusse, et, pour décider plus promptement le nouveau roi à s’unir avec elle contre la France, elle lui envoya tout simplement le billet de M. de Ségur, que Louis XVI venait de nommer ambassadeur à Berlin.

Un autre fait également curieux avait précédé l’arrivée de mon père à la cour de Prusse ; il vous fera voir quelle sympathie excitait alors la révolution française dans le monde civilisé.

Le projet du traité de Pilnitz venait d’être arrêté ; mais les puissances coalisées mettaient un grand prix à laisser ignorer le plus longtemps possible à la France les conditions de cette alliance. La minute du traité se trouvait déjà entre les mains du roi de Prusse, et aucun des agents français en Europe n’en avait encore eu connaissance.

Un soir, assez tard, M. de Ségur, en rentrant chez lui à pied, croit remarquer qu’un inconnu, enveloppé d’un manteau, le suit de près ; il presse le pas, l’inconnu presse le pas ; il traverse la rue, l’inconnu la traverse avec lui ; il s’arrête, l’inconnu recule, mais s’arrête à quelque distance. M. de Ségur était sans armes : doublement inquiet de cette rencontre à cause de la malveillance personnelle dont il sait qu’il est l’objet, aussi bien que de la gravité des circonstances politiques, il se met à courir en approchant de sa maison ; mais, malgré toute sa diligence, il ne