Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/62

Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’un bien-être tout matériel, la nation allemande, enchaînée par une politique de sensualité et par une religion de raisonnement, manque à ses devoirs envers elle-même et envers le monde. Chaque peuple, comme chaque individu, a sa vocation : si l’Allemagne oublie la sienne, la faute en est surtout à la Prusse, qui est l’ancien foyer de cette philosophie inconséquente appelée, par courtoisie, une religion.

La France est aujourd’hui représentée en Prusse par un ministre qui satisfait parfaitement à tout ce qu’on exige d’un homme en place dans le temps où nous vivons. Nul air mystérieux, nul silence affecté, nulle réticence inutile ne trahissent l’opinion qu’il se fait de son importance. On ne se souvient du poste qu’il occupe que parce qu’on lui reconnaît le mérite nécessaire pour en remplir les devoirs. Devinant avec un tact très-fin les besoins et les tendances des sociétés modernes, il marche tranquillement au-devant de l’avenir sans dédaigner les enseignements du passé ; enfin il est du petit nombre de ces hommes d’autrefois devenus nécessaires aujourd’hui.

Originaire de la même province que moi, il m’a donné d’abord sur l’histoire de ma famille des détails curieux et que j’ignorais ; de plus, je lui ai dû un grand plaisir de cœur, je l’avoue sans détour, car on ne peut attribuer à l’orgueil la religieuse admiration que nous éprouvons pour l’héroïsme de nos pères.