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Russie me paraît encore un des plus beaux modèles de prince que j’aie jamais rencontrés.

J’ai été frappé du peu d’élégance de ses voitures, du désordre de ses bagages et de la tenue négligée des gens de service qui l’accompagnent. Quand on compare ce cortége impérial à la magnifique simplicité des voitures anglaises, et au soin particulier que les domestiques anglais ont de toutes choses, on voit qu’il ne suffit pas de faire faire ses équipages chez des selliers de Londres pour atteindre à la perfection matérielle qui assure la prépondérance de l’Angleterre dans un siècle positif comme le nôtre.

Hier, j’ai été voir coucher le soleil sur le Rhin : c’est un grand spectacle. Ce que je trouve de plus beau dans ce pays, trop fameux pourtant, ce ne sont pas les bords du fleuve avec leurs ruines monotones, avec leurs vignobles arides, et qui, pour le plaisir des yeux, prennent trop de place dans le paysage ; j’ai trouvé ailleurs des rives plus imposantes, plus variées, plus riantes ; de plus belles forêts, une végétation plus forte, des sites plus pittoresques, plus étonnants ; mais ce qui me paraît merveilleux, c’est le fleuve même, surtout contemplé du bord. Cette glace immense glissant d’un mouvement toujours égal à travers le pays qu’elle éclaire, reflète et vivifie, me révèle une puissance de création qui confond mon intelligence. Quand je mesure ce mouvement, je me