Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/416

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rent le même succès ; l’Empereur nous traita également bien l’un et l’autre.

Une personne expérimentée et spirituelle m’avait recommandé d’un ton moitié sérieux, moitié railleur, d’avoir le regard respectueux et l’air timide, si je voulais plaire au maître. Ce conseil était bien superflu, car pour entrer dans la hutte d’un charbonnier et faire connaissance avec lui, j’éprouverais une sorte d’embarras physique : tant la sauvagerie m’est naturelle !! Ce n’est pas pour rien qu’on a du sang allemand ; j’eus donc tout naturellement la dose d’embarras et de réserve requise pour rassurer l’inquiète Majesté du Czar qui serait aussi grand qu’il le veut paraître, s’il était moins préoccupé de l’idée qu’on va lui manquer de respect. Nouvelle preuve de ma remarque qu’à cette cour on passe sa vie en répétitions générales ! Cette inquiétude de l’Empereur n’est pourtant pas toujours dominante. Voici une preuve de la dignité naturelle de ce prince.

Je vous ai dit que le Genevois, loin de partager ma modestie surannée, n’était rien moins qu’inquiet. Il est jeune, il a l’esprit de son temps : c’est tout simple ; aussi admirais-je avec une sorte d’envie son air d’assurance chaque fois que l’Empereur lui parlait.

L’affabilité de Sa Majesté fut bientôt mise par le jeune Suisse à une épreuve plus décisive. Au mo-