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qu’une société intime, quelque élégante qu’on la suppose.

En fait de décence de langage, une foule est plus exigeante qu’une cour : plus la hardiesse aurait de témoins, et plus elle deviendrait inconvenante. Tels sont mes motifs pour me dispenser de vous dire ce qui a fait sourire plus d’un grave personnage et peut être plus d’une vertueuse dame ce matin dans la chapelle Impériale. Mais je ne pouvais passer tout à fait sous silence un incident qui contrastait d’une manière par trop singulière avec la majesté de la scène et le sérieux obligé des spectateurs.

Il vient un moment, pendant la longue cérémonie du mariage grec, où tout le monde doit tomber à genoux. L’Empereur, avant de se prosterner comme les autres, jeta d’abord sur l’assemblée un regard de surveillance peu gracieux. Il me parut qu’il voulait s’assurer que personne ne restait debout ; précaution superflue, car, bien qu’il y eût là des catholiques et des protestants, il n’était venu sans doute à la pensée de pas un de ces étrangers de ne point se conformer extérieurement à tous les rites de l’Église grecque[1].

  1. La crainte de l’Empereur est en quelque sorte expliquée par le récit qu’on va lire, et qui m’a été envoyé de Rome au mois de janvier 1843 par une des personnes les plus véridiques que je connaisse. « Le dernier jour de décembre, je fus à l’église del Gesu, qui avait été décorée de superbes tapisseries. Une enceinte avait été