border de toutes parts. Venise et Amsterdam me semblent mieux défendues contre la mer que ne l’est Pétersbourg
Je n’aime pas une ville qui n’est dominée par rien : certes le voisinage d’une rivière large comme un lac et qui coule à fleur de terre dans une plaine marécageuse perdue entre la brume du ciel et les vapeurs de la mer, était de tous les sites du monde, le moins favorable à la fondation d’une capitale. Ici l’eau fera raison tôt ou tard de l’orgueil de l’homme : le granit même n’est pas assuré contre le travail des hivers dans cette humide glacière où la citadelle bâtie par Pierre le Grand a déjà usé deux fois ses remparts et ses fondements de rochers. On les a refaits et on les refera encore pour défendre ce chef-d’œuvre d’orgueil et de volonté qui n’a pas cent quarante ans : quelle lutte !!! Ici les pierres souffrent violence comme les hommes !!!
J’ai voulu passer le pont à l’instant même pour voir de près cette fameuse citadelle ; mon domestique m’a conduit d’abord en face de la forteresse, à la maison de Pierre le Grand, séparée du château fort par une route et par un terrain vague. C’est une cabane conservée, dit-on, dans l’état où l’a laissée le Czar. Dans la citadelle sont enterrés aujourd’hui les Empereurs, et détenus les prisonniers d’État : singulière manière d’honorer les morts !… En pensant à tous