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resque a su si bien profiter, que le mot honneur fut longtemps synonyme de fidélité à la parole, et que la parole d’honneur est encore une chose sacrée, même en France où l’on a oublié tant de choses ! La noble influence des chevaliers croisés s’est arrêtée en Pologne avec celle du catholicisme ; les Russes sont guerriers, mais pour conquérir ; ils se battent par obéissance et par avidité ; les chevaliers polonais guerroyaient par pur amour de la gloire : ainsi, quoique dans l’origine ces deux nations sorties de la même souche eussent entre elles de grandes affinités, le résultat de l’histoire, qui est l’éducation des peuples, les a séparées si profondément qu’il faudra plus de siècles à la politique russe pour les confondre de nouveau, qu’il n’en a fallu à la religion et à la société pour les diviser[1].

« Tandis que l’Europe respirait à peine des efforts qu’elle avait faits pendant des siècles pour arracher le tombeau de Jésus-Christ aux mécréants, les Russes payaient tribut aux Mahométans sous Usbeck et continuaient cependant à recevoir de l’empire grec, selon leur première habitude, ses arts, ses mœurs, ses sciences, sa religion, sa politique avec ses traditions d’astuce et de fraude, et son aversion pour les croisés latins. Si vous réfléchissez à toutes ces données religieuses, civiles et politiques, vous ne

  1. Voyez Lettre quatorzième.