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LETTRE CINQUIÈME.


Le 8 juillet 1839, écrite sans lumière à minuit, à bord du bateau à vapeur le Nicolas Ier, dans le golfe de Finlande.

Nous sommes à la fin du jour d’un mois qui commence, pour ces latitudes, vers le 8 juin, et qui décline vers le 4 juillet. Plus tard, les nuits reparaissent : elles sont d’abord très-courtes, mais déjà marquées ; puis elles s’allongent insensiblement jusqu’à l’équinoxe de septembre. Elles croissent alors avec la même rapidité que les jours au printemps, et bientôt elles enveloppent de ténèbres le nord de la Russie, Pétersbourg, la Suède, Stockholm et tous les alentours du cercle polaire arctique. Pour les contrées renfermées dans ce cercle, l’année se partage en un jour et une nuit de six mois chacun, y compris deux crépuscules plus ou moins prolongés, selon que le lieu est plus ou moins éloigné du pôle. L’obscurité peu profonde de l’hiver dure autant qu’a duré le jour douteux et mélancolique de l’été.

Aujourd’hui je ne puis me distraire de l’admiration que me cause le phénomène d’une nuit du pôle, à peu près aussi claire que le jour. Je me sens hors du monde où j’ai vécu jusqu’à présent ; rien, dans