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convenant, car il n’était lié ni par des devoirs d’état, ni par des considérations de sentiment, ni par des habitudes de société, puisqu’il n’a visité la Russie qu’en voyageur. L’Empereur l’a accueilli avec la grâce et l’affabilité naturelles à ce prince, mais toujours en présence de la cour entière. Simple particulier, il a reçu, pour ainsi dire, une hospitalité publique qui ne l’obligeait qu’à conserver dans ses narrations le ton de politesse imposé à tout homme bien élevé ; le portrait qu’il a fait des augustes personnages qui l’ont accueilli avec une souveraine urbanité, n’a, certes, rien qui les rabaisse aux yeux du monde, au contraire, il se flatte de les avoir grandis dans l’opinion. Sa manière de peindre était connue depuis longtemps : elle consiste à dire tout ce qu’il voit et à tirer des faits jusqu’aux dernières conséquences que lui suggère sa raison et même son imagination, puisqu’il voyage pour exercer toutes les puissances de son intelligence. Il a cru d’autant moins devoir changer sa manière en cette occasion que l’intrépide franchise qui éclate dans son ouvrage était elle-même une flatterie, flatterie trop délicate peut être pour être appréciée par les esprits vulgaires…… mais elle aura été jugée comme elle devait l’être par les esprits supérieurs.

Faire entendre au souverain tout-puissant d’un vaste Empire le cri de l’humanité souffrante, lui parler pour ainsi dire de cœur à cœur, c’est déclarer qu’on le croit