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meura là quelque temps… à quoi tenait le sort des hommes à cette époque !!!

Un soir, trois jeunes gens, attachés à Legendre, et dont l’un s’appelait Rossigneux, j’ai oublié le nom des autres, entrèrent sans lumière, assez tard, dans le bureau, un peu échauffés par le vin ; ils se mettent à courir les uns après les autres, à monter sur les tables, à se battre pour rire ; enfin à faire mille folies. Dans ce désordre, ils ébranlent les rayons du casier, un papier tombe. L’un des tapageurs le ramasse.

« Qu’as-tu trouvé là ? disent les autres.

— Sans doute une pétition, répond Rossigneux.

— Oui ; mais quel est le nom du prisonnier ? »

On appelle quelqu’un ; on demande de la lumière. Dans l’intervalle, les trois étourdis se jurent de faire signer la liberté de la personne désignée dans cette pétition, quelle qu’elle soit, de la faire signer le soir même par Legendre lorsqu’il rentrera, et d’annoncer à l’instant sa délivrance au détenu.

« Je le jure, fût-ce la liberté du prince de Condé, dit Rossigneux.

— Je le crois bien, répondent à la fois les deux autres en riant, il n’est pas prisonnier. »

On lit la pétition ; c’est celle de ma mère dictée par Nanette, et apostillée par les ouvriers de Niderviller.