Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/125

Cette page a été validée par deux contributeurs.

times. Les Jacobins, sous prétexte de punir les tyrans, avaient enseigné la tyrannie à la France, on les frappait avec leurs propres armes. Tous les parents, tous les amis de ma mère étaient dispersés ; personne ne s’occupait d’elle. Jérôme, proscrit à son tour comme ami de Robespierre, était obligé de se cacher et ne pouvait plus la protéger.

Deux mortels mois se passèrent dans un abandon plus désolant peut-être que le péril ; elle m’a répété bien des fois que ce temps d’épreuve fut le plus difficile à supporter.

La lutte des partis continuait ; le gouvernement pouvait d’un jour à l’autre retomber dans les mains des Jacobins. Sans le courage de Boissy-d’Anglas, le meurtre de Féraud fût devenu le signal d’une seconde terreur pire que la première : ma mère savait tout cela, car en prison on n’ignore jamais ce qui peut inquiéter. Chaque jour elle faisait demander à me voir ; j’étais mourant : ma bonne répondait que j’étais malade ; ma mère pleurait et se décourageait.

Enfin, Nanette, après m’avoir sauvé la vie par ses soins, se mit sérieusement en peine de sa maîtresse Voyant que personne ne faisait rien pour ma mère, elle s’en alla chez Dyle, marchand de porcelaine, pour s’entendre avec une cinquantaine d’ouvriers de notre pays qui travaillaient alors dans les ateliers de