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blime. Pauvre Nanette ! elle avait bien de l’énergie ; toutefois, la force de sa raison ne répondait pas à puissance de sentiment. C’était une belle âme, un noble cœur : ce n’était pas un grand caractère. Mais quelle fidélité !… Les revers de ma famille n’ont que trop fait briller son désintéressement et son courage.

Elle portait la hardiesse jusqu’à l’aveuglement ; pendant le procès de mon grand-père, les crieurs publics s’en allaient par les halles, débitant d’atroces injures contre le traître Custine ; quand ma bonne les entendait passer, elle les arrêtait au milieu de la foule, se disputait avec eux, défendait son maître contre la populace, et en appelait jusque sur la place de la Révolution des arrêts du tribunal révolutionnaire.

Que dit-on, qu’ose-t-on écrire contre le général Custine ? » s’écriait-elle sans égard au danger auquel elle s’exposait. « Tout cela est faux : je suis née chez lui, moi, je le connais mieux que vous, car il m’a élevée ; il est mon maître, il vaut mieux que vous tous, entendez-vous ; s’il l’avait voulu, il aurait arrêté votre gueuse de révolution avec son armée, et maintenant vous lui lécheriez les pieds au lieu de l’insulter, lâches que vous êtes ! »

C’est avec des discours semblables et bien d’autres éclairs de bon sens, tout aussi imprudents,