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Philip planta ses dents dans la chair crue et pour bien persuader l’homme-loup qu’il était sans rancune, affecta de prendre à ce dégoûtant festin un plaisir considérable.

Il en était encore à s’escrimer après ce rosbif primitif lorsque Bram, ayant terminé sa viande, se remit sur ses pieds et, sans plus attendre, donna, par un cri aigu, le signal du départ. Les loups s’agitèrent dans leurs traits et Philip reprit sa place dans le traîneau, avec Bram dans son dos.

La diabolique randonnée recommença et, bien des années après, Philip s’en souvenait encore. Tantôt Bram demeurait debout sur le traîneau, tantôt, et plus souvent, il courait soit en arrière, soit en tête de l’attelage. Les loups fournissaient, comme Bram, un effort au-delà de la nature. Ils déferlaient sans trêve sur le Barren neigeux, sans halte ni repos. Si, parfois, ils semblaient fléchir sous leurs traits, le fouet de caribou claquait sur leurs dos gris et la voix aiguë de Bram leur claironnait aux oreilles ses exhortations sauvages. La croûte gelée était si résistante que les raquettes étaient devenues inutiles. À six reprises différentes, Philip, quittant le traîneau, courut de concert avec l’homme-loup, épaule contre épaule, et avec la horde, jusqu’à ce qu’il perdît souffle.

Vers le milieu de l’après-midi, sa boussole lui