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nous ; et à leur aimable clarté nous avions vu, une heure auparavant, une daine et son faon traverser ma petite clairière.

Ces millions d’astres, qui depuis plusieurs nuits m’éclairaient de leur scintillement, me faisaient songer à autant de foyers pleins de lumière et de bonheur qu’aucun rideau n’interceptait à mes yeux ravis.

Une majestueuse forêt nous environnait de sa vie mystérieuse et nous invitait à pénétrer plus avant. Son énorme masse noire se dressait vers le ciel ; au-dessus de ma cabane, ses arbres se courbaient en murmurant, mais autour de nous régnait un profond silence.

Mon ami comprit, comme moi, que l’harmonie des grands bois contenait non seulement la poésie de l’espoir, mais la douce protestation du Maître suprême contre la folie et la barbarie des sectes fanatiques et des religions qui ont semé la discorde sur terre depuis la naissance de la pensée humaine. La voix divine conviait l’homme à rejeter loin de lui cet égoïsme aveugle qui le tient en esclavage et l’empêche de déchiffrer le mystère sublime de la vie et de la mort et de cette éternelle énigme que, faute d’un terme plus approprié, on appelle l’âme.

J’exprimai toutes ces pensées à mon ami et, au bout d’un instant, il posa sa main sur mon bras.

« Écrivez votre histoire, me dit-il. Vous faites vous-même partie de cette nature. Vous comprenez