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Le Sun Rock s’élevait d’un seul jet, dominant le faîte des sapins qui l’entouraient. Sa tête chauve recevait les premiers rayons du soleil levant et les dernières lueurs du couchant s’y accrochaient encore. Sur ce sommet ensoleillé, la tanière de Kazan était bien abritée contre les mauvais vents, à l’opposé desquels elle s’ouvrait, et il s’y reposait délicieusement des six terribles mois d’hiver écoulés.

Presque tout le jour il dormait, avec Louve Grise couchée près de lui, à plat ventre, les pattes étendues, les narines sans cesse alertées de l’odeur de l’homme, qui était proche.

Elle ne cessait de fixer Kazan avec anxiété, tandis qu’il dormait et rêvait. Elle grognait, en découvrant ses crocs, et ses propres poils se hérissaient, lorsqu’elle voyait ceux de son compagnon se dresser sur son échine. Parfois aussi, une simple contraction des muscles des pattes et un plissement du museau indiquaient seuls qu’il était sous l’effet du rêve.

Alors il arrivait souvent que, répondant à la pensée du chien-loup, une voix s’élevait et venait jusqu’au Sun Rock, tandis que sur le seuil de sa cabane une jeune femme aux yeux bleus apparaissait.

— Kazan ! Kazan ! Kazan ! disait la voix.

Louve Grise dressait ses oreilles, tandis que Kazan s’éveillait et, l’instant d’après, se mettait sur ses pattes. Il bondissait vers la pointe la plus haute du rocher et se prenait à gémir, tandis que la voix renouvelait son appel. Louve Grise, qui l’avait doucement suivi, posait son museau sur son épaule. Elle savait ce que signifiait cet appel et, plus encore que le bruit et l’odeur de l’homme, elle le redoutait. Depuis qu’elle avait abandonné la horde de ses frères et vivait avec Kazan, la Voix était devenue la pire ennemie de Louve Grise et elle la haïssait. Car elle lui prenait Kazan et, partout où la Voix était,