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pour bébé, quelle y déposa, et commença à démonter la tente. Ce n’était point pour une femme une tâche facile, car les cordes étaient raides et gelées. Lorsqu’elle eut terminé, une de ses mains saignait, Elle amarra la tente au traîneau.

Pierre Radisson gisait à découvert sur son lit de ramures. Il n’y avait plus au-dessus de lui d’autre toit que le ciel grisâtre et le dôme noir des sapins. Kazan raidit ses pattes et renifla l’air. Son échine se hérissa, lorsque la jeune femme s’en retourna lentement vers l’objet immobile qui était ficelé dans les couvertures. Elle fléchit le genou et pria.

Lorsqu’elle revint vers le traîneau, son visage était pâle et inondé de larmes. Elle jeta un long regard vers le Barren sinistre, qui s’étendait à perte de vue devant elle. Puis, se courbant vers le chien-loup, elle l’attela au harnais et, assujettissant elle-même autour de sa taille la courroie dont son père s’était servi, tous deux se mirent à tirer.

Ils cheminèrent ainsi, dans la direction indiquée par Pierre Radisson. La marche était pénible et lente sur la neige molle, tombée la veille, et que le blizzard avait amoncelée par places, en gros tas mous.

Il y eut un moment où le pied manqua à Jeanne, qui s’effondra sur une de ces masses neigeuses. Elle perdit, dans sa chute, son bonnet de fourrure, et ses cheveux se dénouèrent sur la neige. Aussitôt Kazan fut près d’elle et, du bout de son museau, il lui toucha le visage.

— Loup ! gémit-elle. Oh ! Loup !

Elle se remit debout, tant bien que mal, et la petite caravane recommença à avancer.

Le fleuve fut enfin atteint et le traîneau peina moins sur la glace, où la neige était moins épaisse. Mais un vent violent du nord-est ne tarda pas à souffler. Il soufflait de face et Jeanne courbait la tête,