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fit un crochet vers la droite et vint se jeter vers un des chefs de la meute, qui lui barra la route, de ses mâchoires ouvertes. Le caribou s’arrêta, le temps d’un éclair, et Kazan en profita pour lui sauter à la gorge.

Tandis que le reliquat des loups accourait en hurlant, la bête vaincue s’écroula sur le sol, écrasant à moitié sous son corps Kazan, dont les crocs ne firent que s’enfoncer davantage dans la veine jugulaire. Malgré le poids qui pesait sur lui et l’étouffait, il ne lâcha point son emprise. C’était sa première grosse proie. Son sang brûlait, plus ardent que du feu, et il grognait entre ses dents serrées. Pas avant que le dernier spasme de l’agonie n’eût abandonné le caribou, Kazan ne se dégagea de la lourde poitrine, Il avait, dans la journée, tué et mangé un lapin, et n’avait pas faim. Il se recula donc et, s’asseyant dans la neige, regarda tranquillement la horde déchiqueter le cadavre.

Comme le festin tirait à sa fin, il se hasarda parmi ses nouveaux frères, farfouilla du museau entre deux d’entre eux, et en reçut, en guise de bienvenue, un coup de dent.

Tandis qu’il se retirait un peu en arrière, se demandant s’il convenait d’insister, une grosse louve, se détachant de la bande, bondit soudain vers lui, droit à sa gorge. Il eut tout juste le loisir de parer l’attaque, en se couvrant de son épaule, et les deux bêtes allèrent rouler et rouler encore dans la neige.

À peine Kazan et la louve s’étaient-ils remis sur leurs pattes que l’excitation de cette brusque bataille détourna vers eux l’attention des autres loups. Abandonnant les restes du caribou, ils firent cercle, découvrant leurs crocs, hérissant comme des brosses leurs dos d’un gris jaunâtre, tandis qu’un des deux chefs s’avançait vers Kazan, pour le défier. Dès que les