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épouvanté, Puis il revint de l’avant, épiant curieusement les soubresauts d’agonie de la malheureuse bête.

Pressentant que les choses n’avançaient pas, Louve Grise vint vers le lapin, le renifla de près, une demi-douzaine de fois, sans toutefois lui donner le coup de dent libérateur, et tourna vers Bari sa face aveugle. Quant à Kazan, nonchalamment couché par terre, à quelques pas de là, il continuait à observer et semblait beaucoup se divertir.

Chaque fois que Louve Grise baissait la tête et promenait son museau sur le lapin, les petites oreilles du louveteau se dressaient, attentives et alertées. Lorsqu’il vit qu’aucun mal n’arrivait à sa mère, il s’approcha un peu plus, prudemment et les pattes raides. Bientôt il fut à même de toucher le lapin et, comme sa mère, il posa son museau sur la fourrure qui gisait, en apparence inerte.

Mais le lapin n’était pas encore mort. Dans une violente convulsion, il replia et déplia son train de derrière, envoyant à Bari une maîtresse ruade, qui l’envoya s’étaler, plusieurs pieds plus loin, piaillant de terreur.

Rapidement, pourtant, le louveteau se remit sur ses pattes. Il était en grande colère et éprouvait un violent désir de se venger. Il revint à la charge, moins craintivement, son petit dos tout hérissé, et, achevant lui-même son éducation, enfouit ses crocs aigus dans le cou du lapin. Il sentit la vie palpiter dans le corps pantelant, les muscles du lapin agonisant se contracter sous lui, et il ne desserra point ses dents avant que tout frisson vital n’eût disparu chez sa première victime.

Louve Grise était ravie. Elle donna, de sa langue, une caresse au louveteau et Kazan, s’étant relevé, exprima son approbation par un reniflement bien senti. Bari mangea du lapin tout ce qu’il voulut, et jamais