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élans[1] nouvellement appariés, voletait et criaillait à leur adresse. Un gros geai lissait ses plumes au soleil. Plus loin, ils entendirent un lourd sabot qui faisait craquer sous son poids les brindilles dont le sol était jonché. Ils perçurent aussi l’odeur d’une mère-ours, qui était fort occupée à tirer vers le sol les branches d’un peuplier et leurs bourgeons, dont se délectaient ses oursons. Partout s’exhalait de la nature le mystère amoureux et celui de la maternité. Et Louve Grise ne cessait de frotter sa tête aveugle contre celle de Kazan. Elle n’était pour lui que caresses et invites à se recroqueviller tout contre elle, dans un nid bien chaud.

Elle n’éprouvait nul désir de chasser. L’odeur d’un caribou, ni celle de la mère-ours, n’éveillaient plus en elle aucun instinct combatif. Son ventre s’était alourdi de nouveau et elle s’ingéniait en vain à dire cela à son compagnon.

Ils arrivèrent tous deux en face de l’arbre creux qui avait été leur ancien gîte. Kazan le reconnut aussitôt et Louve Grise le sentit.

Le sol, légèrement exhaussé, n’avait point été, ici, envahi par l’eau provenant de la fonte des neiges et qui mettait son miroir dans mainte partie du marais. Mais un petit torrent encerclait le bas de l’arbre et l’isolait complètement.

Tandis que Louve Grise dressait l’oreille au clapotis des eaux, Kazan cherchait, à droite et à gauche, un gué qu’il fût loisible de traverser. Il n’en trouva point, mais un gros cèdre qui était tombé en travers du torrent et formait pont. Il s’y engagea et, après quelques hésitations, Louve Grise le suivit. Ils parvinrent ainsi à leur ancienne retraite. Ils en

  1. L’oiseau-des-élans, moose-bird. Ces oiseaux ont l’habitude de venir se poser sur le dos des élans, qu’ils débarrassent de leurs parasites, comme font chez nous les sansonnets avec les bœufs et les moutons.