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causes permettent de prévoir que l’ionisation doit, en général, être attribuée en partie à l’action de rayons absorbables et en partie à l’action de rayons pénétrants. L’existence d’un rayonnement très pénétrant à la surface de la terre a, en effet, été constatée par de nombreux observateurs, et tout d’abord par M. Mc Lennan et MM. Rutherford et Cooke[1]. M. Mc Lennan mesurait la conductibilité de l’air dans un récipient métallique qui se trouvait à l’intérieur d’un récipient plus grand, l’espace intermédiaire pouvant être rempli d’eau, dont la couche avait 25cm d’épaisseur. Lors de l’introduction de l’eau, l’ionisation dans le vase intérieur se trouvait réduite à 63 pour 100 environ de sa valeur initiale ; cette ionisation était donc due en grande partie à une radiation extérieure qui s’est trouvée totalement ou partiellement supprimée.

MM. Rutherford et Cooke ont constaté de même qu’on pouvait réduire l’ionisation dans un vase clos en entourant celui-ci d’écrans absorbants, par exemple d’écrans de plomb. Avec un écran de 5cm d’épaisseur, l’ionisation était diminuée de 30 pour 100 environ ; le même résultat était obtenu avec des écrans de fer. L’effet des écrans semblait épuisé pour des épaisseurs de quelques centimètres. En disposant convenablement les écrans. M. Cooke a pu s’assurer que la radiation pénétrante vient indifféremment de tous les côtés. Des résultats semblables ont été obtenus avec des vases placés en plein air loin de tout bâtiment, de sorte qu’il est certain que la radiation pénétrante n’est pas due uniquement aux substances radioactives présentes dans les laboratoires, mais doit être considérée comme provenant du sol et de l’atmosphère.

Le rôle des écrans est complexe. S’ils absorbent le rayonnement pénétrant extérieur, ils peuvent aussi émettre eux-mêmes un tel rayonnement. Conformément à cette remarque, on a pu aussi observer l’accroissement de l’ionisation dans un vase clos par l’action de parois solides placées au voisinage. Ainsi une radiation pénétrante vient de la brique ; quand on place un électroscope à l’intérieur d’une cage en brique, l’ionisation peut se trouver augmentée de 50 pour 100, et l’effet n’est épuisé que pour de grandes épaisseurs. On doit donc attribuer aux briques une ra-

  1. Mc Lennan, Phys. Rev., 1903. — Rutherford et Cooke, Amer. Phys. Soc., 1902. — Cooke, Phil. Mag., 1903.