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en sens contraire par suite de la présence dans la paraffine de charges résiduelles qui ne se dissipent que très lentement ; la disparition de ces charges est favorisée par une exposition aux rayons du radium en l’absence du champ. Des phénomènes analogues sont observés avec le soufre. La conductibilité qui s’établit dans les diélectriques, soumis à l’action des rayons pénétrants du radium, semble se maintenir en présence du radium ; elle peut être observée pendant un grand nombre de jours.

Ainsi la production d’ions sous l’influence des rayons pénétrants des corps radioactifs a lieu dans les corps solides comme dans les corps liquides et les corps gazeux. Les effets observés rappellent les effets de polarisation résiduelle des diélectriques après action du champ électrique, de sorte qu’on peut se demander si cette polarisation n’est pas liée à la présence d’ions à l’état normal dans les diélectriques solides.

On peut étudier l’action des rayons sur les diélectriques solides, en utilisant comme source radiante le polonium[1],[2]. Les diélectriques : soufre, paraffine, sont utilisés en couche très mince. Le courant dû au rayonnement, très fort au début, en comparaison du courant spontané, se réduit rapidement à zéro. Si alors on réunit entre elles les armatures du condensateur, on observe la production d’un courant de sens inverse qui restitue la quantité d’électricité recueillie auparavant par le système. Ces résultats paraissent attribuables entièrement ou presque entièrement à la présence de bulles gazeuses entre la lame isolante et les armatures qui la recouvrent. Cependant on pourrait s’attendre à observer un phénomène analogue en admettant que les rayons produisent l’ionisation dans une couche très mince du diélectrique, et que les ions produits ne peuvent éprouver qu’un déplacement très limité ; le courant s’éteindrait quand le déplacement des charges dans la couche ionisée aurait donné lieu à la production d’un champ inverse annulant le champ primitivement établi.

Les diélectriques solides possèdent, en général, une faible conductibilité spontanée, qui augmente avec la température ; il en est de

  1. Bialobjesky, Comptes rendus, 1909.
  2. Greinacher, Le Radium, 1909.