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des scintillations observées dans l’air à la pression atmosphérique commençait à diminuer quand la distance à la source était inférieure de 6mm environ à la longueur du parcours, et la diminution se poursuivait ensuite régulièrement jusqu’à la disparition complète. Le même effet a été constaté pour les rayons de l’actinium B[1].

Ainsi toutes les particules ne parviennent pas à la même distance de leur point d’émission. Ce fait s’expliquerait facilement si la vitesse d’émission des diverses particules n’était pas rigoureusement la même, mais se trouvait comprise entre certaines limites assez rapprochées ; cette hypothèse pourrait être en relation avec l’hypothèse plus générale, d’après laquelle les atomes d’une même substance radioactive ne sont pas exactement semblables en tout point (voir § 98). Cependant l’expérience ne semble pas favorable à cette supposition (voir § 129). On sait, d’autre part, qu’en se déplaçant dans l’air (ou dans tout autre milieu matériel), les particules éprouvent une réduction progressive de leur vitesse (§ 129), et l’on pourrait admettre avec M. Geiger que des particules qui ont été émises primitivement avec la même vitesse et qui ont accompli le même trajet dans l’air, peuvent cependant avoir une vitesse variable entre certaines limites, les conditions de leurs chocs contre les molécules rencontrées n’ayant pas été les mêmes. Il en résulterait que le parcours que peut effectuer une particule avant d’avoir subi l’absorption pourrait aussi varier dans certaines limites. Étant donné le très grand nombre des molécules que rencontre une particule (environ molécules sur la longueur de 1cm), il semble cependant difficile d’expliquer dans cette manière de voir qu’un écart moyen de quelques millimètres sur la longueur mesurable du parcours puisse prendre naissance par le simple effet du hasard des rencontres. Une autre interprétation paraît plus probable. L’expérience a montré que l’hypothèse primitive, d’après laquelle le trajet des rayons dans l’air est rectiligne, ne s’applique plus vers la fin du parcours, les conditions du mouvement étant alors plus complexes. Avant d’avoir été définitivement absorbées dans l’air, les particules paraissent éprouver une dispersion importante, de sorte qu’un faisceau de rayons primitivement parallèles subit un épanouissement vers la fin du

  1. Mlle Blanquies, Comptes rendus, 1910.