Page:Curie - Traité de radioactivité, 1910, tome 1.djvu/419

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de plus, d’un travail fait par M. Rutherford en 1905, que les rayons sont, selon toute probabilité, des particules chargées positivement, de dimensions atomiques, émises avec une grande vitesse par les corps radioactifs. On pouvait donc admettre que le départ d’une telle particule entraîne la destruction de l’atome dont elle provient. Diverses expériences sur les émanations radioactives (diffusion, condensation à basse température, dissolution dans les liquides, etc.) étaient venues vers la même époque appuyer l’hypothèse sur la nature matérielle des émanations radioactives. Se basant sur l’ensemble de ces faits, MM. Rutherford et Soddy ont exposé, en 1903, une théorie détaillée des phénomènes de la radioactivité, considérés comme résultant de la désintégration des atomes ; ils ont indiqué en même temps diverses conséquences de la théorie proposée[1].

La découverte du dégagement spontané de chaleur par le radium, par P. Curie et M. Laborde, date du début de l’année 1903[2]. Cette découverte très importante est venue montrer combien est considérable le dégagement d’énergie du radium. Un atome-gramme de radium dégage pendant chaque heure une quantité de chaleur comparable à celle dégagée par la combustion dans l’oxygène d’un atome-gramme d’hydrogène. P. Curie et M. Laborde s’exprimaient à ce sujet ainsi qu’il suit : « Le dégagement continu d’une telle quantité de chaleur ne peut s’expliquer par une transformation chimique ordinaire. Si l’on cherche l’origine de la production de chaleur dans une transformation interne, cette transformation doit être de nature plus profonde et doit être due à une modification de l’atome de radium lui-même. Une pareille transformation, si elle existe, se fait avec une extrême lenteur, car les propriétés du radium n’éprouvent pas de variation notable en plusieurs années. Si donc l’hypothèse précédente était exacte, l’énergie mise en jeu dans la transformation des atomes serait extraordinairement grande. » P. Curie et M. Laborde indiquaient dans la même Note que le dégagement de chaleur pourrait aussi s’expliquer en admettant que le radium utilise une énergie extérieure.

  1. Rutherford et Soddy, Phil. Mag., mai 1903.
  2. Curie et Laborde, Comptes rendus, mars 1903.