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tion ou à la destruction d’atomes radioactifs, admet comme base essentielle ce fait expérimental que la radioactivité est un phénomène atomique. À ce point de vue la théorie des transformations des corps radioactifs offre une extension naturelle des idées fondamentales qui nous ont conduits, P. Curie et moi, à la découverte du polonium et du radium.

L’étude des rayons et de leur identité avec les rayons cathodiques a donné lieu à diverses images d’un atome radioactif. C’est ainsi que M. Perrin[1] proposait pour un atome l’image d’un petit système planétaire dans lequel les corpuscules les plus éloignés du centre d’attraction seraient susceptibles de se détacher le plus facilement. Becquerel[2] proposait de considérer l’atome comme composé de particules chargées positivement ou négativement, conformément aux théories de M. J.-J. Thomson ; les particules chargées négativement constitueraient les rayons les particules chargées positivement les rayons , et il y aurait aussi des particules non chargées constituant l’émanation et pouvant former un dépôt matériel de radioactivité induite sur les corps solides ; les particules de ce dépôt subiraient à leur tour une subdivision donnant lieu à une émission de rayons matériels.

M. Rutherford a admis, dès 1900, que les émanations et les dépôts de radioactivité induite étaient de nature matérielle. À la suite de leurs expériences sur la nature chimique des émanations, MM. Rutherford et Soddy assimilaient celles-ci à des gaz inertes de la famille de l’argon. Enfin, au courant de recherches sur la séparation du thorium X à partir du thorium, ces mêmes savants ont admis, en 1902[3], que le thorium X est une matière chimiquement distincte du thorium et produite par celui-ci d’une manière continue, mais éprouvant en même temps une destruction spontanée suivant une loi caractéristique. La radioactivité constante du thorium résultait ainsi d’un équilibre entre la production de thorium X et sa destruction spontanée. MM. Rutherford et Soddy ont dès lors considéré que la radioactivité est due, d’une manière générale, à une désintégration atomique. Il résultait

  1. Perrin, Revue scientifique, 1901.
  2. Becquerel, Comptes rendus, 1901.
  3. Rutherford et Soddy, Phil. Mag., 1902.