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lument distincts que nous apprendrons à préciser d’une manière très complète. On peut admettre que toute espèce de rayons déterminée peut servir à caractériser une matière qui en est la source, apparaît et disparaît avec elle.

De plus, il importe d’insister sur ce fait que la radioactivité est une propriété essentiellement atomique, de sorte que toute création, ou destruction, d’une espèce de radioactivité distincte des autres, correspond à une création, ou destruction, d’atomes d’une certaine matière radioactive.

Nous dirons, par exemple, en nous plaçant à ce point de vue, que le radium est la source de production d’atomes d’un gaz nommé émanation ; que les atomes d’émanation sont susceptibles d’éprouver une destruction spontanée accompagnée de production d’atomes de dépôt actif, lesquels se détruisent aussi à leur tour. La formation des atomes de dépôt actif étant liée à la destruction des atomes d’émanation, il est naturel d’admettre que les atomes de dépôt actif se forment aux dépens des atomes d’émanation détruits.

La destruction du radium n’a pas pu être observée directement ; on peut cependant supposer que cette destruction a lieu réellement, tout en étant trop lente pour avoir pu être constatée, et que les atomes de radium donnent lieu, en se détruisant, à la production d’atomes d’émanation.

On peut admettre, d’une manière générale, que tout corps radioactif est en voie de destruction plus ou moins rapide, et qu’aucun état stable ne peut être atteint tant que la transformation donne lieu à la production d’un autre corps également radioactif. La stabilité ne pourrait être réalisée que pour la matière inactive.

La théorie qui vient d’être exposée est une théorie de transmutation d’éléments chimiques. Cette théorie se trouve parmi celles qui ont été proposées pour l’explication des phénomènes de la radioactivité, presque aussitôt après la découverte du rayonnement uranique. La forme précise sous laquelle la théorie est adoptée actuellement est l’œuvre de MM. Rutherford et Soddy[1]. Voici quelle a été la marche de l’évolution des idées à ce sujet.

Dès le début des recherches sur la radioactivité, la spontanéité du

  1. Rutherford et Soddy, Phil. Mag., 1903.