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pérature si basse, tant que l’on continue à faire fonctionner la trompe. On observe donc à certains points de vue des phénomènes analogues à ceux qui auraient lieu pour un gaz liquéfié, mais, d’autre part, la température de condensation de l’émanation du radium ne semble pas dépendre notablement de la concentration. Il est d’ailleurs certain que dans les expériences de condensation l’émanation n’était pas présente en quantité suffisante pour qu’une véritable liquéfaction ait pu se produire, la pression de la vapeur étant devenue saturante. On peut aussi rappeler que, même pour les gaz pour lesquels cette condition est remplie, la condensation n’a pas toujours lieu à la même température. Au sein du gaz il se produit, en général, par abaissement de température, une sursaturation, à moins que le gaz ne contienne des centres de condensation qui peuvent être des poussières.

On peut penser avec plus de vraisemblance que la condensation des émanations très diluées à basse température présente plutôt une analogie avec l’absorption des gaz par les parois solides froides. On sait que ce phénomène est électif, c’est-à-dire que certaines matières absorbent plus ou moins facilement certains gaz. C’est ainsi que le charbon de bois absorbe très facilement à la température de l’air liquide les gaz communs de l’air et l’argon, mais le néon et l’hélium ne sont pas absorbés. On a vu plus haut que le charbon absorbe l’émanation très énergiquement à la température ordinaire. Dans les mêmes conditions les parois de verre, de plomb, de cuivre absorbent cette émanation très faiblement et à un degré inégal, tandis que le celluloïd et le caoutchouc l’absorbent en plus forte proportion.

Si la condensation des émanations à basse température est assimilable à une absorption exercée par la paroi solide, cette absorption est probablement élective, et l’on devrait s’attendre à trouver que, d’une part, la proportion de l’émanation non condensée dans des conditions déterminées croît régulièrement avec la température, et que, d’autre part, cette proportion dépend de la nature de la paroi sur laquelle se produit la condensation. L’allure générale du phénomène est conforme à cette manière de voir ; la marche de la condensation est tout à fait progressive pour l’émanation du thorium et aussi pour celle de l’actinium ; pour l’émanation du radium la condensation se fait plus brusquement.